Legal Operations

COMMENT S'ASSURER DU BON DIMENSIONNEMENT DE LA FONCTION JURIDIQUE ?


De toutes les grandes fonctions support, la fonction juridique est celle qui présente les plus grandes disparités de dimensionnement y compris entre des entreprises de même secteur d'activité et à isopérimètre.

Certes la maîtrise des effectifs et des budgets est une règle de base du management mais disposer de ressources suffisantes et adaptées aux besoins de l'entreprise est une condition essentielle à la performance du département juridique.

Alors, comment s’assurer de son bon dimensionnement ?

Le cas échéant, comment démontrer efficacement à la Direction générale qu'un investissement supplémentaire dans le département juridique est nécessaire?

L’intelligence économique et le benchmark permettent de répondre à ces questions et fournissent à la Direction juridiques des référentiels d'analyses objectifs. Toutefois, il s’agit d’une démarche scientifique qui nécessite une méthodologie rigoureuse.


Voici nos 4 recommandations :


1. Le panel de benchmark

Le volume et la qualité des données sont le socle de toute démarche d’intelligence économique et de benchmark.

La fonction juridique n’échappe pas à cette règle.

Le panel de benchmark doit donc être représentatif, vérifié, actualisé et avec un nombre d’entreprises suffisant qui permette la segmentation d’analyse la plus fine possible afin de prendre en compte toutes les spécificités de nature à impacter la fonction juridique.

Il convient d’éviter les segmentation « fourre-tout » comme les macro-secteurs d’activité du type « Distribution » ou « Industrie ».

De telles segmentations couvrent des situations d’entreprises si différentes que le benchmark n’a plus de sens. Il ne peut aboutir qu’à des résultats présentant des écarts d'amplitudes telles qu’aucune interprétation raisonnable n’est possible.

Le panel de benchmark doit également être représentatif des autres critères de segmentation, la taille de l’entreprise bien sûr ou encore le nombre de filiales, la part d’activité internationale…


2. L’exhaustivité des données

Pour la fiabilité des résultats, le processus de benchmark impose également l’exhaustivité des données, qu’il s’agisse des informations nécessaires au profilage de l’entreprise ou celles utilisées pour l’évaluation du dimensionnement de la fonctions juridique stricto sensu.

Les informations détenues par le département juridique ne sont pas toujours suffisantes et nous préconisons de les sécuriser ou de les compléter des données issues du contrôle de gestion financier (à défaut de contrôle de gestion juridique) et de la comptabilité analytique.

Cela permet par exemple de récupérer et d’intégrer des dépenses décentralisées qui ne remontent pas au département juridique faute d’un processus de reporting suffisant ou qui ne sont tout simplement pas inscrites à son budget mais qui doivent néanmoins être prises en compte pour une juste appréciation de la couverture du besoin juridique global de l’entreprise.


3. La pertinence et la multiplicité des indicateurs de gestion

L’objectif du benchmark de dimensionnement est de fournir à la direction juridique des éléments d’évaluation sécurisés et fiables. Il est donc essentiel de s’assurer d’une part de la pertinence des indicateurs utilisés et d’autre part de la fiabilité des résultats obtenus.

En matière d’indicateur budgétaire, le référentiel le plus communément utilisé est le chiffre d’affaires (CA). C’est le plus simple mais pas le plus pertinent. Il ne traduit que la performance des ventes et non la performance globale de l’entreprise et il ne permet pas de neutraliser les coûts directs de production en particulier pour les entreprises industrielles et commerciales.

Nous recommandons donc de substituer au CA les soldes intermédiaires de gestion, et en particulier la Valeur ajoutée (VA) qui exprime la création de richesse brute de l’entreprise ou l’accroissement de valeur qu’elle a générée du fait de ses activités courantes. Elle représente une très bonne traduction de l’activité de l’entreprise.

C’est la raison pour laquelle, par convention, la VA est le référentiel pivot retenu pour la très grande majorité des analyses afférentes aux fonctions support.

L’excédent brut d’exploitation et le résultat d’exploitation sont également des référentiels intéressants pour illustrer la corrélation entre le dimensionnement des fonctions support de l’entreprise et sa performance opérationnelle.

Disposer de référentiels pertinents n’est pas suffisant, il est également nécessaire de multiplier les ratios analytiques. Un nombre insuffisant d’indicateurs ou des indicateurs trop macro ne garantissent pas l’évaluation objective de la fonction juridique.

La multiplication des indicateurs met en lumière la symétrie des courbes de tendance,  elle peut aussi révéler la convergence de signaux faibles et donc renforcer et fiabiliser les résultats et les analyses qui en découlent.


4. L'importance des indicateurs qualitatifs

Les indicateurs de gestion permettent une évaluation précise du dimensionnement des effectifs et du budget du département juridique mais il ne traduisent pas son activité réelle.

Pour apprécier le niveau de performance de la fonction, il est nécessaire de rapprocher les ressources et les dépenses mesurées aux indicateurs d’activité les plus pertinents selon le profil de consommation juridique de l’entreprise (Volume du M&A en nombre et en valeur, nombre de contrats gérés, activités contentieuse, nombre de marques et de brevets déposés…)

La mise en place de tels indicateurs qualitatifs met en perspective et donne du sens aux indicateurs de gestion, ils peuvent infirmer ou confirmer leur interprétation. Ainsi un surdimensionnement apparent de la fonction juridique pourra être justifié par un volume d’activité supérieur à celui constaté dans le panel de benchmark correspondant.


En respectant ces 4 recommandations, le benchmark du dimensionnement de la fonction juridique constitue un processus d’analyse et d’évaluation éprouvé qui permet à la direction juridique de vérifier et de s’assurer avec sécurité du bon dimensionnement de son département.

Par ailleurs :

• Le benchmark fournit à la direction juridique les référentiels utiles pour défendre et promouvoir les moyens et ressources nécessaires pour répondre aux besoins juridiques de l’entreprise.

• Le benchmark alimente également la réflexion organisationnelle du directeur juridique en lui facilitant la prise de décisions grâce à des données objectives.

• Enfin, l’identification des axes d’amélioration permet de prioriser les actions à mettre en œuvre et de définir de façon plus efficace les plans d’amélioration de la performance de la fonction juridique.



Denis SAURET - 06 décembre 2021



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